C’est dans une atmosphère de mobilisation internationale et de solidarité renouvelée que l’Algérie a accueilli, du 19 au 22 mai 2025, les Assemblées annuelles du Groupe de la Banque islamique de développement (BID), consacrant Alger comme épicentre des nouvelles ambitions économiques du monde islamique. Pour la troisième fois depuis sa création en 1974, l’institution multilatérale a choisi la capitale algérienne pour organiser ses travaux ; un privilège réservé jusque-là uniquement au pays abritant le siège de l’organisation (Arabie saoudite).
Cette reconnaissance traduit la centralité croissante de l’Algérie dans les dynamiques de coopération Sud-Sud, mais aussi son engagement affirmé en faveur d’un développement durable, inclusif et stratégiquement ancré dans l’économie islamique mondiale.
Par Hacène Nait Amara
Dès l’ouverture des travaux, le Premier ministre Nadir Larbaoui a donné le ton, en appelant à une refondation politique du développement panislamique, fondée sur l’autonomie économique, la solidarité active et la transformation industrielle.
Dans un contexte marqué par l’accumulation de crises systémiques, le PM algérien a plaidé pour une coopération islamique plus intégrée et plus résiliente, mettant en garde contre les limites d’un simple mécanisme financier.
Par ailleurs, et en réaffirmant le soutien de l’Algérie à la cause palestinienne et à l’indépendance économique du monde musulman, Larbaoui pointe, en creux, la place d’Alger comme figure de proue d’un multilatéralisme islamique renouvelé.
Il convient de savoir que cette édition 2025 de la BID a réuni plus de 4 000 participants, issus de 89 pays et de 70 institutions et avait pour thème «Enrichir les vies par la diversification économique»
Un thème ambition, ordonné en quatre journées et traduit par des conférences ministérielles et de panels d’experts, de sessions techniques, de forums sectoriels et de rencontres bilatérales. Chose qui reflète une volonté commune d’agir face aux défis mondiaux et aux fractures internes des pays membres.
L’on en retiendra encore plus la signature de plus de 70 accords au total, pour une enveloppe globale de 5 milliards de dollars, couvrant les domaines stratégiques de l’énergie, du transport, de l’agriculture, de la santé et de la numérisation.
L’occasion aussi pour la BID de présenter son nouveau cadre stratégique 2026-2035, articulé autour de cinq axes majeurs, et destiné à positionner l’institution comme acteur de référence dans la transformation inclusive des économies islamiques.
Il faut dire que dans le succès de cette édition, l’Algérie s’est hissée au-delà de son simple statut d’hôte. En effet, la stature diplomatique du pays, combinée à l’organisation logistique exemplaire, saluée du reste par le président de la BID, en a fait un modèle d’efficacité.
Dans cette veine, il est à noter que le ministre des Finances Abdelkrim Bouzred, à la tête du Conseil des gouverneurs, a été félicité pour sa conduite sage des travaux et son sens du consensus.
Une reconnaissance qui s’inscrit, d’ailleurs, dans une dynamique déjà engagée et traduite par la signature d’un accord de partenariat structurant entre la BID et l’Algérie, prévoyant un cadre triennal de coopération à hauteur de 3 milliards de dollars. Un plan qui vise à accompagner les chantiers économiques du pays dans les infrastructures, le soutien au secteur privé, et la transformation productive.
Egalement, L’économie ‘’halal’’ at trouvé à Alger un espace de réflexion et de mise en réseau unique, grâce à un forum dédié tenu en marge des Assemblées. Organisé par le Centre d’excellence de la BID à Kuala Lumpur et ses partenaires malaisiens et saoudiens, le forum a jeté les bases d’un nouvel écosystème halal global, appelant à l’harmonisation des normes, à la reconnaissance mutuelle des certifications et à la création de clusters industriels.
Dans le même sillage, notons qu’une session de «business matching» a permis aux entreprises algériennes et malaisiennes de nouer des partenariats stratégiques, renforçant le rôle de l’Algérie comme trait d’union entre l’Afrique et l’Asie du Sud-Est.
Sur un autre plan, le forum du «Lives and Livelihoods Fund» n’a pas manqué de souligner le rôle de catalyseur joué par l’Algérie dans les efforts de réduction de la pauvreté et d’adaptation climatique. Ainsi, avec un financement de plus de 5,5 milliards de dollars en trois ans, et un soutien ciblé à des projets dans 15 pays, ce fonds ancre les politiques de développement dans des logiques de justice sociale et d’impact mesurable. À cela vient s’ajouter l’action de la SIACE qui a annoncé, lors de cette édition, des contrats de plus de 700 millions de dollars, dont un accord emblématique avec la CAGEX algérienne, preuve d’une volonté d’enracinement régional.
Enfin, la présentation de projets phares par le ministre algérien de l’Énergie et des Mines a consacré la vision nationale de diversification économique, grâce à la réduction de la dépendance aux hydrocarbures (90 % des exportations, 20 % du PIB), la conversion locale de 50 % des ressources pétrolières d’ici 2030, le déploiement de 15 000 MW d’énergie solaire ainsi que la mise en valeur des richesses minières pour l’emploi local. Des ambitions qui traduisent, au demeurant, une stratégie volontariste de souveraineté industrielle, énergétique et technologique, au service d’un modèle de croissance intégré.
En définitive, plus qu’un simple sommet financier, les Assemblées annuelles de la BID à Alger ont dessiné les contours d’une nouvelle géographie de la coopération islamique. Une géographie où l’Algérie se pose non seulement en plateforme de dialogue, mais en moteur de transformation. L’avenir, à Alger, s’est écrit au présent !
H.N.A.