A l’heure où l’innovation et l’exportation deviennent des priorités nationales, la question de la protection juridique des créations s’impose plus que jamais. Comment sécuriser une marque, préserver un brevet ou défendre un logo face à la contrefaçon ? Le séminaire international « Algérie connectée : Production, innovation et exportation », organisé le 24 juin par le cabinet Fares Legal, a consacré une large place à ces enjeux stratégiques qui concernent directement les entrepreneurs, industriels et porteurs de projets.
Mohamed Sebbagh, chef du département de la réglementation et de l’information à l’Institut national algérien de la propriété industrielle (INAPI), a souligné, d’emblée, un principe simple mais essentiel : « La marque et le brevet ne sont pas que des formalités. Ce sont des actifs vitaux qui protègent et valorisent l’entreprise ».
Pour les professionnels, la propriété industrielle repose sur un socle juridique comparable à la propriété matérielle : « Les démarches d’acquisition suivent la même logique : déclarer, enregistrer et faire reconnaître ses droits », a-t-il précisé. Ces droits sont toutefois strictement territoriaux. Autrement dit, un titre protégé en Algérie n’a aucune valeur à l’étranger si le déposant n’effectue pas de démarches internationales.
L’intervenant a insisté sur les critères déterminants pour valider une marque, à savoir, l’originalité, l’absence de caractère trompeur et le respect de l’antériorité. Les similarités visuelles ou phonétiques avec une marque existante constituent un risque sérieux de refus : « On ne peut pas enregistrer un signe qui reproduit ou imite de façon confuse une marque déjà déposée », a-t-il rappelé. Des exemples concrets ont illustré ces situations, notamment les conflits liés à des appellations proches de grandes marques étrangères.
Les marques, qu’elles soient nominatives, figuratives ou combinées, bénéficient en Algérie d’une protection renouvelable tous les dix ans. Néanmoins, faut-il encore accomplir toutes les formalités et surveiller l’usage de son signe, sous peine de perte des droits.
Les brevets obéissent à des règles tout aussi exigeantes. Pour être protégée, une invention doit réunir trois conditions cumulatives : la nouveauté, l’inventivité et l’application industrielle : « Un produit connu, même partiellement, ne peut pas être revendiqué comme une invention. La protection vise ce qui apporte une solution technique inédite », a rappelé le représentant de l’INAPI.
Le séminaire a mis en lumière une réalité parfois négligée : la propriété industrielle n’est pas seulement un outil défensif. Comme l’a bien précisé Mohamed Sebbagh, « c’est un élément stratégique qui permet de se différencier et d’accroître sa crédibilité sur les marchés ». Il a également rappelé les règles relatives aux licences et cessions. Ces opérations doivent être formalisées par écrit et enregistrées auprès de l’INAPI. Sans cet enregistrement, aucun transfert de droits n’est opposable.
Autre point essentiel : l’importance de la déclaration de protection. Sans dépôt officiel, aucune action judiciaire ne peut être engagée pour contrefaçon, même si l’usage de la marque ou de l’invention est notoire. « L’enregistrement est la seule garantie légale. Beaucoup de professionnels l’ignorent encore », a-t-il souligné, avec insistance.
En clôture, Mohamed Sebbagh a invité les participants à considérer la propriété industrielle comme un pilier de leur stratégie d’innovation et d’exportation : « La meilleure démarche consiste à intégrer la protection dès la conception du produit ou du service. C’est un investissement qui sécurise l’avenir de l’entreprise », a-t-il conclu.
Karima Mokrani




