Accueil DOSSIER Djamel Belmadi : l’homme par qui le miracle arriva

Djamel Belmadi : l’homme par qui le miracle arriva

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Juin 2018, la Fédération algérienne de football, sous la pression du public, met fin au contrat de Rabah Madjer à la tête de la barre technique de l’équipe nationale. Pour le remplacer, il n’est pas question de se précipiter. Le bureau fédéral, élu seulement en mars 2017, avait déjà consommé deux sélectionneurs et essuyé autant de fiascos. Le président Kheireddine Zetchi veut un « grand nom ». Le public, lui, exige qu’on donne enfin sa chance à Djamel Belmadi qui, contrairement à Madjer et son prédécesseur l’Espagnol Lucas Alcaraz, avait fait ses preuves sur les bancs. 

Par Zerrouk B.

é en France de parents immigrés d’origine algérienne, Djamel Belmadi a fait une carrière de footballeur plutôt respectable, jouant notamment à l’Olympique de Marseille et à Manchester City. Entre 2000 et 2004, il a été sélectionné à vingt reprises en équipe nationale, marquant cinq buts dont un sublime coup-franc dans la cage de Fabien Barthez lors du match France-Algérie en 2001.
Mais c’est de l’autre côté de la barrière qu’il impressionnera. Nommé entraîneur du club qatari de Lekhwiya en 2010, il entreprend de mettre en place un projet de jeu sur le long terme, basé sur la possession et les contre-attaques, quelque peu calqué sur la philosophie de Pep Guardiola qui faisait fureur à l’époque. Prétentieux, Belmadi ? Voyons plutôt la suite. Pour sa première année, il termine champion du Qatar, performance qu’il rééditera trois fois. Lors de ses deux passages (2010-2012 et 2015-2018) à Lekhwiya, devenu Al-Duhaïl, l’Algérien a collectionné les titres, coupes nationales et championnats, tapant dans l’œil de la fédération qatarie qui lui confie d’abord la sélection B en 2013 puis carrément les A avec lesquels il enlève la coupe du Golfe en 2014.

« Troisième choix de la Fédération »
Difficile avec un tel palmarès de ne pas séduire le très connaisseur public algérien. Belmadi est réclamé dans les stades et sur les réseaux sociaux, au moment où Zetchi prospectait du côté des « grands noms » quitte à malmener davantage la trésorerie de la fédération, déjà saignée par les deux expériences infructueuses. Vahid Halihodzic, l’auteur de l’excellent parcours des Verts au Mondial 2014, ou encore Carlos Quéiroz, passé notamment par le banc de Manchester United, déclinent l’offre. Zetchi se rabat alors sur son troisième ou quatrième choix. Belmadi est engagé début août. A 42 ans, il devient sélectionneur de l’Algérie.
Lorsque, il y a deux ans, un journaliste lui demandait si l’équipe nationale l’intéressait, il répond qu’il n’était pas prêt. L’est-il maintenant ? Sans doute, puisque dès sa prise en main de l’équipe, il développe un autre discours, optimiste à outrance, synonyme d’un autre état d’esprit à inculquer aux joueurs : la gagne. A la veille du départ en Egypte pour disputer la CAN-2019, vers la mi-juin, il choque en déclarant en conférence de presse qu’il ambitionnait de revenir à Alger avec le trophée, la kahloucha comme l’appelleront plus tard les supporters. La dernière –et unique- victoire de l’Algérie en Coupe d’Afrique remontait à 1990, à domicile. En trois décennies, les Verts ont collectionné les déceptions dans l’épreuve continentale. La dernière édition, par exemple, les a vus sortir sans gloire dès le premier tour. Surtout, les Algériens ont fini par se faire à l’idée que leur équipe ne gagera jamais la CAN en dehors de ses bases. Le grief de « prétention » refait surface, même si, pour qui connaît les rudiments du football, une telle ambition n’avait rien de démesuré pour une équipe constellée de grands joueurs évoluant pour certains dans les meilleurs clubs de la planète. Belmadi sait ce qu’il dit. Et surtout ce qu’il fait.

Une forte personnalité
En arrivant sur le banc des Verts, Djamel s’est attaqué aux maux qui rangeaient le groupe : la démotivation et les luttes d’égo. Très vite, il lui fait retrouver la solidarité, l’envie de jouer et surtout de gagner, la rigueur tactique et la discipline sur et en dehors du terrain. Avec Belmadi, personne n’est indispensable, mais personne n’est de trop.
Rigoureux, sérieux, à cheval sur la discipline, proche des joueurs, discret, sa forte personnalité séduit chaque jour davantage.
Il n’a pas trop chamboulé l’effectif, mais certains de ses choix ont fait jaser avant de s’avérer fructueux, comme le rappel de Adlène Guedioura ou la titularisation de Smaïl Bannaceur qui terminera meilleur joueur de la CAN.
Sur le plan tactique, le jeune coach, fidèle à sa philosophie, a métamorphosé en dix mois seulement le visage des Verts qui développent un jeu léché basé sur la solidité défensive, la possession de balle et parfois des contre-attaques ponctuées par des passes en retrait. Quinze passes successives conclues par un tir de Bennaceur sur la transversale en demi-finale face au Nigeria, c’est le Barça en vert. Belmadi a surtout su régler le récurrent problème de la fébrilité défensive de l’équipe. En sept matchs, le gardien M’bolhi n’a été battu qu’à deux reprises.
Tout cela ne pouvait se terminer qu’en apothéose. Le 19 juillet au soir, dans le mythique stade international du Caire, le capitaine Ryad Mahrez monte sur le podium pour recevoir le trophée de la CAN à l’issue d’un match épique face au Sénégal. Non, Belmadi n’est pas prétentieux. C’est juste qu’il connaît son métier…
Z. B.

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